Où l'on parle du référendum, de la Suisse et du salami.
Paris, 11 novembre. Mais quelle mouche l’a piqué ? On savait le chef de l’État particulièrement créatif dans les initiatives diplomatiques, qui suscitent le plus souvent l’étonnement poli de ses partenaires. Mais le voici qui joue à présent avec les institutions.
Dimanche dernier, dans une lettre aux dirigeants des partis représentés au Parlement, le président propose deux évolutions constitutionnelles.
La première sur le référendum d’initiative partagée : abaisser le seuil pour en permettre l’organisation, d’un dixième du corps électoral à un million d’électeurs seulement. Diviser par deux le nombre de parlementaires requis (93 contre 185). Et enfin donner aux citoyens la possibilité d’en prendre l’initiative.
Un RIC, en somme, comme le réclamaient les Gilets jaunes.
La seconde évolution porte sur le champ du référendum. Le président propose de l’élargir aux « questions dites “sociétales” », comme la fin de vie, ou à « des réformes plus larges touchant plusieurs aspects intriqués entre eux, comme c’est le cas des questions migratoires, qui relèvent de sujets régaliens, économiques, sociaux ou même diplomatiques ».
Est-ce bien raisonnable ?
Bien sûr, il y a des arguments pour. La Suisse, par exemple. Ils en font régulièrement. Et ça marche !
Euh, pas vraiment. Le politologue genevois François Cherix le rappelait en décembre dernier : « La démocratie directe suisse n’est pas un modèle à suivre. » Car les référendums d'initiative populaire « offrent un avantage concurrentiel inouï aux mouvements protestataires ». Et cette pratique a pour effet de « découper toute pensée politique en tranches de salami ».
Du salami ! Ah non.
Oui, mais la souveraineté du peuple ? Après tout c’est d’elle que procède la démocratie représentative. Et quand celle-ci patine ou s’abime dans les manœuvres partisanes, comment faire ?
Le problème, c’est qu’un appel au peuple ne va pas faire avancer le débat.
Il va le figer. C’est toute la différence entre une loi qu’on discute à l’Assemblée et un bout de papier avec OUI / NON.
Sur Telos, on avait publié en 2016 un article qu’on espérait définitif sur la question, mais, hélas, le président ne l’a pas lu. Jetez-y un coup d’œil, vous qui avez la chance d’être ici :
« Dans un référendum, les termes du choix sont fixés dès le départ de la procédure. La délibération collective est limitée aux options préalablement déterminées. La discussion, l’échange des arguments, l’apport d’informations nouvelles ne peuvent pas faire émerger de solutions non envisagées par les initiateurs du référendum. Cette situation doit être comparée à celle qui prévaut dans la procédure parlementaire. Là, la délibération de l’assemblée peut, sauf exception, faire apparaître des options nouvelles par le jeu des amendements, soit lors du travail en commission, soit en séance plénière. Ajoutons que, dans un référendum, ceux qui formulent la question jouissent d’un pouvoir radicalement inégal au pouvoir de ceux qui la discutent puisque ceux-ci ne peuvent changer les termes fixés par ceux-là. Or il est connu que la formulation d’une question influence puissamment la réponse qui lui apportée. »
Voilà. Le papier, cosigné par Bernard Manin, Elie Cohen et Gérard Grunberg, s’appelle « Le référendum, un instrument défectueux », et il a été publié le 13 juillet 2016. S’il y a parmi nous un collaborateur du président, peut-il faire le passer à son patron ?
Gérard Grunberg, 6 novembre
La déclaration solennelle commune des deux anciens premiers ministres publiée dans la Tribune Dimanche du 5 novembre est une bonne nouvelle. Elle n’est pas cependant exempte d’ambiguïtés. Car le rapprochement de ces deux centres est une opération très ambitieuse et très difficile à mener à bien dans un pays comme la France.
Pierre-André Taguieff, 7 novembre
La question se pose de savoir pourquoi, dans les démocraties libérales, la gauche a tendance à diaboliser l’adversaire plus que la droite ne le fait. Plus, c’est-à-dire avec plus d’intensité polémique, en mobilisant tout l’éventail des passions négatives. C’est particulièrement le cas de l’extrême gauche radicale, notamment dans sa version «woke», qui préfère se définir comme «progressiste».
Didier Locatelli, 8 novembre
Contrairement au discours de ceux qui voient dans la loi Climat et Résilience un texte «qui condamne à mort le monde rural et à la glaciation les villes moyennes», il se pourrait que l’objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN) soit une opportunité de redynamiser les centralités des territoires ruraux.
Kristian Feigelson, 9 novembre
En contrepoint des images télévisées et de celles, sidérantes, qui circulent sur les réseaux sociaux, le cinéma israélien travaille la question de la guerre d’une manière originale, qui a évolué au fil du temps. Son approche est rarement frontale: c’est moins la guerre en elle-même que les expériences intimes et sociales sur lesquelles elle ouvre qui sont explorées. Le cinéma participe ainsi d’une construction plus critique de l’histoire récente d’Israël pour souvent fonctionner comme une contre-histoire.
Corinne Vadcar, 10 novembre
Prônée par le GIEC, absente du Plan d’action pour la transition écologique, la sobriété pourrait devenir un principe organisateur de nos sociétés. Mais elle est trop souvent réduite à sa dimension énergétique, ou à une vision décroissantiste à tonalité punitive ou sacrificielle. Bien plus prometteuses apparaissent les explorations menées par des entreprises pionnières, qui cherchent à opérer un vrai découplage entre création de valeur et sollicitation de ressources.